Appointment Scheduling : notre processus de construction de cet outil

Alban CocolonSolution Manager chez Hardis Supply Chain

Alors que les WMS orchestrent parfaitement les flux internes, dans près de 60% des cas, la planification des rendez-vous transport reste massivement gérée hors système via des fichiers Excel ou mails.

C’est dans cette zone grise, entre transport et logistique, que se concentrent les frictions majeures matérialisées par des relances téléphoniques, des attentes imprévues voir une saturation des quais.

Il existe déjà des solutions sur le marché adressant ce maillon mais très peu avec une intégration native au WMS. Et c’est précisément la raison qui nous a poussés à développer et à innover pour aboutir à Appointment Scheduling.

Dans cet article, Alban Cocolon, Solution Manager chez Hardis Supply Chain, raconte comment cette conviction s’est transformée en une solution concrète.

Le besoin d’innovation

Hardis Supply Chain est au plus près des besoins terrains avec une forte base clients et notamment des 3PL. Et pendant longtemps, nous avons pu constater que la planification des arrivées transport n’était pas considérée comme un sujet critique.

Dans la mesure où les marchandises finissaient par être acheminées, il était estimé que le processus restait satisfaisant. Même si cela impliquait des ajustements de dernière minute, des équipes réaffectées dans l’urgence ou des décisions prises par téléphone faute d’une vision fiable.

Mais la situation évolue étant donné ce que le process doit désormais absorber.

Les flux deviennent plus volatils, les délais plus serrés, les attentes clients plus exigeantes. Et surtout, ce n’est plus la performance au cœur de l’entrepôt qui bloque, mais la synchronisation des arrivées avant même l’exécution logistique.

« On voyait des entrepôts ultra-performants mais fragilisés par un simple manque d’anticipation sur ce qui allait arriver demain matin. » décrit Alban.

Lors de nombreuses visites terrain réalisées ces deux dernières années (chez des 3PL, des retailers omnicanaux et des industriels) nous avons observé la même scène décrite ci-dessous.

Un transporteur arrive sans créneau officiellement enregistré. Le quai prévu n’est plus disponible. Une équipe est déplacée en urgence. Un autre chargement est mis « en attente ». L’information circule mais trop tard, trop fragmentée et non consolidée.

Ce n’est pas qu’il n’y a pas de coordination.

C’est qu’elle n’est ni visible, ni fiable, ni anticipable.

Ce que le terrain nous a appris

Au fil de dizaines d’entretiens structurés menés avec des responsables logistiques, planificateurs et DSI, le constat s’est imposé, peu importe la taille, la maturité IT ou le secteur.

La prise de rendez-vous transport reste l’un des maillons les moins maîtrisés de la chaîne logistique, alors même que tout ce qui suit (réception, stockage, préparation, chargement) est désormais largement digitalisé et optimisé.

Dans la grande majorité des sites rencontrés :

  • La coordination repose encore sur des échanges informels et parallèles (e-mails, appels, fichiers partagés) ;
  • Les planificateurs passent une part disproportionnée de leur temps à relancer, arbitrer, vérifier ;
  • Les quais alternent entre sous-charge imprévue et pics ingérables ;
  • Les directions IT cherchent à éliminer les outils “hors contrôle SI” ;
  • Les solutions du marché, souvent conçues pour le transporteur uniquement, manquent de profondeur d’intégration avec le WMS.

Alban souligne :

« Le sujet n’était pas technologique. C’était un problème d’alignement opérationnel. Tout le monde agissait — mais jamais avec la même information, ni au même moment. »

Ce sujet n’est donc pas un simple irritant opérationnel.

Il génère des pertes de temps invisibles, une charge mentale permanente et une capacité réduite à anticiper et décider.

C’est précisément ce constat qui a déclenché la réflexion produit de notre côté en tant qu’éditeur, dans une logique d’innovation continue au service de nos clients.

De l’idée à la vision produit

Actuellement, toutes les organisations Supply Chain gèrent déjà « quelque chose ». Mais ce « quelque chose » est presque toujours hors du cadre SI.

Typiquement, cela peut-être des fichiers Excel copiés-collés, des calendriers partagés “non officiels” ou encore des mails transférés en chaîne.

Autrement dit, un shadow IT institutionnalisé, toléré parce qu’il semble fonctionner, mais invisible et incontrôlable pour la DSI.

« À partir du moment où on a vu qu’une grande majorité des sites avaient un Excel maison pour gérer les créneaux, on a compris que le problème n’était pas fonctionnel, mais organisationnel. »

Côté IT, l’enjeu est aussi clair et logique. Les DSI ne veulent plus ajouter de brique périphérique qui recréera exactement le même problème dans plusieurs mois et sous un autre format.

Une fois les analyses des entretiens menées, les premiers contours d’une solution se dessinait :

  • Une solution qui n’est pas un simple remplacement d’un fichier Excel ;
  • Une solution qui élimine la nécessité d’en maintenir une autre en parallèle ;
  • Une solution qui doit être immédiatement activable en standalone ;
  • Une solution pensée nativement comme un prolongement du WMS.

La conception d’Appointment Scheduling

Nous ne voulions pas concevoir une “fonction de prise de rendez-vous”.

Nous avons conçu un système qui supprime la tentation de recréer, par exemple, un Excel à côté tout en étant immédiatement adoptable, sans prérequis technique.

Le principe directeur (et nous y tenions) était que chaque acteur doit pouvoir agir sans dépendre d’un autre, ni attendre que l’information “descende”.

Nous ne parlons donc pas d’une interface unique pour tout le monde, mais d’un portail multi-rôles, où chacun voit exactement ce qui lui est utile et rien de plus.

Le workflow avant Appointment Scheduling :

Transporteur → Email ou appel au site → Confirmation manuelle → Saisie Excel locale → Ressaisie WMS → Transmission orale à l’équipe quai

Caractéristiques : lent, informel, opaque, source de stress permanent

Le workflow après Appointment Scheduling :

Transporteur → Réservation directe sur portail → Synchronisation automatique avec le WMS → Notification immédiate à l’équipe logistique dans l’entrepôt

Caractéristiques : rapide, visible par tous, traçable, piloté

Nos 3 angles de conception structurants

1. Côté transporteur

Accès 24/7, en quelques clics, sans relance ni délai.

→ Zéro friction, zéro dépendance à un interlocuteur.

2. Côté opérationnel

Vue temps réel consolidée, alertes de saturation, règles configurables par site.

→ Anticipation — pas compensation.

3. Côté système d’information

Architecture cloud native multi-tenant, intégration native avec Hardis WMS, API ouverte.

→ Zéro Shadow IT, zéro rupture de continuité, mise à jour continue, scalabilité et disponibilité.

« Le but n’était pas de prendre des rendez-vous “plus vite”. Le but était d’empêcher qu’on ressorte un Excel six mois après le lancement. » ajoute Alban.

Les impacts attendus et observés

Au départ, les équipes ne parlaient pas de retour sur investissement mais d’un besoin simple qui était donc de ne plus subir les arrivées transport, de ne plus travailler « en réaction » permanente.

L’objectif n’était pas de “faire plus” mais de retrouver de la maîtrise, de la lisibilité et de la sérénité opérationnelle.

Très rapidement, les effets suivants ont été observés sur les premiers sites pilotes :

 

Métrique observée Avant Appointment Scheduling Après mise en place Effet concret sur le terrain
Pilotage des arrivées Réactif, dépendant des relances Visible, anticipable, piloté en continu Moins d’urgence, décisions prises en amont
Utilisation des quais Usage irrégulier, pics et creux Charge mieux lissée, disponibilité maîtrisée Capacité réellement optimisée
Temps planificateur Coordination manuelle chronophage Charge administrative divisée Temps réalloué au pilotage
Charge mentale Stress permanent, posture défensive Vision claire, pilotage serein Moins de tension subie
Expérience transporteur Attente, incertitude, multiples échanges Réservation directe, autonomie Satisfaction immédiate

 

Voici un cas pilote mené chez l’un de nos clients.

Sur un site logistique traitant environ 2 800 palettes par semaine en réception, la mise en production a permis de :

  • +18 % de capacité absorbée, sans recruter ni étendre l’infrastructure ;
  • 4 heures hebdomadaires libérées par planificateur, réallouées à du pilotage anticipatif ;
  • 70 % des créneaux basculés immédiatement du téléphone vers le portail ;
  • Premiers signaux de détente ressentis sur les pics de tension habituels.

Ce n’est donc pas une simple optimisation locale. C’est un changement de posture opérationnelle, visible dès les premières semaines.

Retour d’expérience interne Hardis Supply Chain

Ce que les premiers déploiements ont surtout confirmé, c’est que la clé de la réussite ne se jouait pas dans la technologie, mais dans la capacité à créer un bénéfice immédiat sur le terrain en évitant un maximum les prérequis ainsi que la complexité.

Ce que nous avons appris :

Leçon 1 : La maturité IT ne peut pas être un prérequis

→ Le produit doit pouvoir fonctionner immédiatement en stand-alone, sans attendre d’intégration WMS.

« Notre meilleur argument n’était pas “on s’intègre parfaitement”, mais “vous pouvez démarrer demain”. »

Leçon 2 : L’adoption se gagne dans les 48 premières heures

→ Zéro friction, zéro mode d’emploi, bénéfice concret dès les premiers jours, sinon l’usage décroche.

« Si le transporteur ne réserve pas dans les deux premiers jours, il risque de ne jamais revenir. »

Leçon 3 : Le ROI perçu n’est pas d’abord financier

→ Les équipes veulent savoir si elles vont arrêter d’absorber les urgences, pas combien d’euros elles économiseront dans 12 mois.

« Les directeurs ne nous demandent pas un business case mais plutôt s’ils vont enfin dormir tranquille sur les pics. »

Et après ?

Digitaliser la prise de rendez-vous est un point d’entrée stratégique vers une supply chain réellement synchronisée, collaborative et anticipative.

Les directions logistiques et IT ont besoin d’un « meilleur outil ». D’avoir une continuité de l’information de bout en bout, sans rupture, sans dépendance à un fichier parallèle, sans interprétation locale.

Appointment Scheduling n’est donc pas une brique isolée.

Au contraire, iIl s’inscrit déjà dans une trajectoire claire :

  • Du quai isolé vers une visibilité réseau multi-sites, synchronisée en temps réel ;
  • D’un simple échange transport/opérations vers une plateforme logistique étendue, incluant fournisseurs, clients et partenaires ;
  • D’un pilotage réactif à un pilotage maîtrisé avec un temps d’avance partagé entre tous les acteurs.

À terme, l’ambition est de mettre fin à cet angle mort entre intention d’expédition, exécution logistique et visibilité partagée dans un modèle où le WMS, le transport et le réseau opèrent enfin sur une même base de réalité.